Le blog du Président de la FAGE

Régulièrement, la présidente ou le président de la FAGE publie une tribune sur des sujets liés à l'enseignement supérieur et la recherche, à la jeunesse ou à la société.

Vous pouvez également y retrouver des articles de ses prédécesseurs Paul Mayaux, président de 2020 à 2022, Orlane François, présidente de 2018 à 2020, Jimmy Losfeld, président de 2016 à 2018 ainsi qu'Alexandre Leroy, président de 2014 à 2016.

29/08/18

Interdiction des signes ostentatoires à l’Université : la FAGE s’oppose fermement à la proposition de loi

L’Université n’est pas exempte de ces débats et le 3 juillet dernier, plusieurs députés ont déposé une proposition de loi au Sénat afin d’interdire les ports de signes ostentatoires et prosélytes dans nos établissements d’enseignement supérieur. La FAGE s’oppose vivement à cette conception de la laïcité appliquée à l’Université

La laïcité : un principe cardinal de notre République

En France, notre République est depuis plus d’un siècle indépendant du pouvoir religieux. La loi de 1905, issue de longs débats est un élément fondateur de la République moderne qui vient séparer l’État des cultes pour s’affranchir du dogme religieux. Avoir un État séculier ne signifie pas que les citoyens français ont vocation à le devenir, mais dans les affaires publiques, la République ne reconnaît aucun dieu. Libre à chaque individu de vivre sa foi ou non, dans le respect du principe de séparation des églises et de l’Etat.

Il important que préciser que dans notre pays, discriminer une population en fonction de son origine, de la couleur de sa peau ou encore sur ses croyances est heureusement illégal. Ces actes sont punis par la loi et sont souvent révélateurs d’un racisme qu’il faut vivement combattre. Notre pays est celui de la tolérance et du respect de l’altérité. C’est aussi le pays de la liberté d’expression, de la liberté de conscience, de croire ou de ne pas croire, et de la liberté de blasphémer.

La loi égalité et citoyenneté, que la FAGE a soutenue en 2016, vient d’ailleurs mettre enfin fin au délit de blasphème, alors encore présent dans le droit local alsacien. Alors que d’autres pays comme l’Allemagne ou la Nouvelle-Zélande punissent encore le blasphème; en France c’est un droit pour chacun, car la liberté de conscience et d’expression nous autorise à critiquer tout dogme, toute religion.

Ce droit de critiquer des croyances est consubstantiel de la République, de l’Université et de la libre pensée. Tout comme l’est l’interdiction de discriminer ou stigmatiser des individus en raison de leur appartenance à un culte ou non. Il s’agit là de deux concepts bien différents: le droit de blasphémer et le devoir de traiter à égalité chaque individu, indépendamment de ses croyances. Le droit au blasphème est synonyme de liberté et d’émancipation. Mépriser le principe d’égalité entre un individu en raison de sa foi relève du racisme, d’une forme de haine intolérable.

Nous revendiquons en tant qu’étudiants le droit d’être critiques envers les religions et leurs expressions, mais également le devoir de lutter pour l'égalité des droits, contre toutes les discriminations.

La laïcité, en garantissant la liberté de conscience de toutes et tous, a depuis un siècle, assuré le vivre-ensemble, sans céder aux communautarismes, au racisme ou à l’obscurantisme.

La vision de la laïcité que porte la FAGE n’est pas celle d’un outil contre la religion, mais pour la garantie de la liberté de croire ou de ne pas croire. “La loi protège la foi aussi longtemps que la foi ne prétend pas dicter la loi”.

Attachée depuis toujours à la promotion d’une société de cohésion sociale, de fraternité et, d’égalité des droits, la FAGE ne peut laisser la notion de laïcité être galvaudée par celles et ceux qui y voient des principes radicalement opposés à ceux qui ont constitué le cœur de notre République. 

L’Université, un espace singulier au sein de la République :

La loi 2004 portant sur l’interdiction des signes ostentatoires au sein de l’école républicaine et laïque est justifiée car elle s’adresse à un public mineur, dont tout risque de prosélytisme doit être écarté. Transposer cette loi dans l’enseignement supérieur et imposer l’interdiction des signes religieux à l’Université est un tout autre sujet contradictoire avec la mission des Universités.  

Les étudiants sont majoritairement de jeunes adultes, en quête d’autonomie et d’indépendance. A l’Université c’est le principe de liberté doit prévaloir. La liberté de conscience, de croire ou de ne pas croire. La liberté de manifester ses croyances de manière ostentatoire ou non. La liberté de manifester son athéisme ou son agnosticisme ou non. La liberté de s’exprimer, de débattre, de blasphémer. La liberté.

Créer de la matière intellectuelle collective, donner des clés de lecture aux jeunes qui fréquentent les associations étudiantes est l’objectif qui a été poursuivi tout au long des travaux devant amener la FAGE à prendre position en 2015 sur ce sujet central. La FAGE porte ainsi par principe de ne pas interdire le port de signes ostentatoires à l’Université et de garantir la liberté de conscience pour chacun dans le strict respect de l’égalité des droits entres les individus.

Un Etat laïque doit aussi, et avant tout, permettre les conditions de l’émancipation de toutes et tous en favorisant l’accès aux connaissances et à la culture en luttant contre toutes les formes d’obscurantisme, les préjugés et les superstitions. L’éducation pour tous a donc un rôle décisif. S’il est légitime de condamner et réprimer les comportements illégaux, délictuels, il n’est ni opportun ni justifiable de contraindre les consciences. Être laïque c’est se battre pour le débat public, le pluralisme, l'expertise dans tous les domaines.

Le contexte économique et social, lorsqu’il se dégrade, pousse toujours une partie des citoyens vers le repli sur soi. Les premiers concernés sont d’ailleurs les jeunes, et les premières opprimées sont souvent les femmes. La réponse politique doit être la lutte contre toutes les formes d’inégalités, de discriminations et de précarités qui participent d’un contexte social dégradé.

La FAGE rappelle que la séparation de l’Etat et des religions permet le dépassement des convictions religieuses pour construire un avenir commun. La loi, par définition au service de tous, ne peut dépendre des convictions personnelles : elle s’impose à tous. Si une loi peut tout à fait légitimement être critiquée dans le cadre de la République, elle s’applique tant que le principe démocratique ne s’est pas exprimée pour la modifier.

Une proposition de loi aux antipodes des réponses aux défis qui s’imposent à notre société :

Ce projet de loi n’est donc ni souhaité et ni souhaitable. Sans être naïfs, les étudiants sont capables de se construire un appareil critique, d’apprendre la valeur des mots tolérance et liberté. C'est la raison même de l'enseignement supérieur et la mission des étudiants.

Comme le disait l’article 7 de la charte Grenoble : 

“ En tant qu’intellectuel, l’étudiant a le devoir :
- de rechercher, propager et défendre la Vérité, ce qui implique le devoir de faire partager et progresser la culture et de dégager le sens de l’histoire ;
- de défendre la liberté contre toute oppression, ce qui, pour l’intellectuel, constitue la mission la plus sacrée." 

La FAGE s’oppose vivement à cette interdiction.

La manifestation de sa liberté de conscience à l’Université ne devrait pas être un sujet d’inquiétude. Ce qui est le plus inquiétant ce sont les discours de ceux qui souhaitent nuire à cette liberté. Qu’ils proviennent des extrêmes politiques ou des fondamentalismes religieux de tous bords, leur présence sur certains campus, leur volonté de séduire la jeunesse sont à combattre. Ce n’est pas à la loi d’intervenir ici, c’est à la communauté universitaire de se saisir du sujet et redonner à l’Université sa dimension universelle et universaliste. C’est aux étudiants, aux personnels et aux enseignants de se donner le courage de leurs convictions : de garantir le libre accès à l’Université tout en combattant les communautarismes, de garantir la liberté de conscience sur les campus et dans les laboratoires tout en combattant activement les racismes et la haine de l’autre.

L ’Université est et doit rester un lieu d’épanouissement et de construction d’esprits libres ouvert à toutes et tous

Aucun étudiant ne peut être stigmatisé en raison de ses convictions religieuses et de leur expression, tant que celles-ci s’inscrivent dans le respect des libertés et des responsabilités de chacun.

  • Le service public, en respect de son devoir de neutralité et de sa responsabilité d’égalité doit assurer les conditions d’une cohésion sociale.
  • Rien ne peut justifier qu’une atteinte soit portée, par l’intervention des religions, à la liberté de la recherche, au contenu des enseignements et aux franchises universitaires.
  • Les convictions religieuses personnelles ne peuvent justifier de porter atteinte au bon déroulement des cours et au droit des étudiants d’y assister.
  • La FAGE s’oppose fermement à toute proposition de légiférer sur le port de signes religieux, vestimentaires ou non, à l’Université. La FAGE s’oppose également avec fermeté à celles et ceux qui jugent légitime de légiférer ou de statuer sur la manière dont une femme doit se vêtir ou non.

L’Université est par définition un lieu de débat, de confrontation des idées et des valeurs : aucun sujet, aucun débat ne doit être rendu impossible à l’Université tant que ceux-ci se situent dans le cadre légal et le respect des libertés individuelles et collectives.

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