La précarité étudiante est une réalité en France depuis de très nombreuses années. La démocratisation de l’enseignement supérieur, l’augmentation du coût de la vie et la non-augmentation, voire la diminution, des aides sociales ces dernières années sont des facteurs qui sont venus la renforcer. Pour rappel, 38% de la population étudiante est boursière (source MESRI) et 20% des étudiant vivent sous le seuil de pauvreté en France (enquête "Revenu, niveau de vie et pauvreté en 2016" de l’INSEE publiée en 2018).
Plusieurs facteurs viennent aujourd’hui aggraver la situation dans ce temps de crise :
Le premier est le coût de l’alimentation. En effet, depuis la fermeture des universités le 16 mars dernier, les restaurants universitaires et/ou cafétérias assurant une restauration à tarification sociale pour l’ensemble des étudiants universitaires ont fermé leur porte. Ainsi, de nombreux étudiants qui bénéficiaient du « Ticket RU » à 3,30 euros pour s’alimenter se voient aujourd’hui contraints de s’acheter leurs aliments en grande surface. Souvent bien plus chers, les repas sont donc moins équilibrés et parfois moins nombreux. De plus, certains étudiants vivant en résidence CROUS voient parfois la porte de la cuisine collective fermée pour faute d’entretien par les services du CROUS.
Les associations d’aides alimentaires sur-sollicitées dans la période
Lorsqu’elles ont réussi à maintenir leur activité, les associations d’aides alimentaires voient les demandes augmenter de manière considérable.
Le réseau des AGORAé, épiceries sociales et solidaires de la FAGE, présent sur une bonne partie du territoire a vu les demandes d’accompagnement exploser ces derniers jours. Plusieurs milliers d’étudiants reçoivent donc des colis gratuits pour une semaine dans de nombreuses villes universitaires.
La situation est encore plus compliquée pour les étudiants lorsque les associations n’ont pas pu continuer leur activité faute de moyens financiers et techniques pour garantir la sécurité de toutes et tous.
Le second facteur venant renforcer cette précarité est la perte d’une activité rémunérée. En France, c’est un étudiant sur deux qui a une activité rémunérée au court de ses études (enquête de l’OVE, « Conditions de vie des étudiant.e.s » de 2016). La crise du Covid-19 vient donc fortement impacter l’activité de nombreux étudiants.
Les étudiants stagiaires :
Pour les étudiants qui étaient en stage avant le début du confinement, la convention devait être maintenue par l’établissement mais elle pouvait être rompue par l’employeur si jamais le télé-travail était impossible. Pour les étudiants qui devaient commencer un stage après le début du confinement, les établissements ont alors effectué des avenants pour décaler le stage dans le temps, ou ce dernier a tout simplement été annulé. De ce fait, l’étudiant perd sa gratification (environ 580 euros minimum pour un stage de 35 heures/semaine, mais plus élevée parfois selon l’entreprise et le secteur d’activité).
Les étudiants ayant une activité rémunérée en parallèle de leurs études :
De nombreux étudiants ont vu leur activité impactée par le confinement. Les conséquences économiques sont lourdes. Des exemples de profils :
Des étudiants avec des « petits jobs » comme du babysitting, de l’aide aux devoirs etc. Ces activités ont donc cessé pour beaucoup, du fait du confinement et de la diminution forte des besoins.
Les étudiants qui avaient prévu de travailler sur la période de vacances d’avril n’ont pas pu le faire.
Les étudiants ayant un contrat de travail dans des commerces non essentiels sont au chômage partiel et subissent pour beaucoup une perte de revenu.
Les étudiants vacataires (par exemple, dans une bibliothèque universitaire) ont vu leur revenu baisser voire disparaître totalement. Une attention particulière est à porter sur les doctorants qui enseignent en tant que vacataires dans des établissements : même si la consigne a été donnée de rémunérer les vacataires de la même façon qu’un mois normal, ce n’est pas toujours appliqué ou bien la rémunération peut diminuer.
Les étudiants exerçant une activité indépendante type chauffeur de VTC ont vu leur activité amputée et donc leur revenu baisser.
La perte de revenu vient donc fragiliser voire mettre dans une situation très compliquée l’étudiant. En effet, les revenus servent souvent à payer le loyer de son logement ou bien à se nourrir. Les familles des étudiants ne peuvent pour certaines plus leur venir en aide car elles rencontrent également des difficultés nouvelles.
Les réponses du gouvernement face à cette situation sont aujourd’hui insuffisantes pour venir accompagner correctement ces étudiants. Il est nécessaire de créer une aide cadrée nationalement pour celles et ceux ayant perdu une activité, d’aider au paiement des loyers de manière plus conséquente voire de les suspendre dans le parc social, de faciliter fortement l’accès aux aides d’urgences des CROUS… Retrouvez les demandes de la FAGE ici.
Les étudiants restés en résidences sont plus fragilisés par la situation
En France, c’est environ 70% de l’ensemble des étudiants qui ont quitté le domicile familial pour aller étudier (enquêtes de l’OVE sur le logement étudiant, octobre 2017). A l’annonce du confinement, des étudiants n’ont pas quitté leur logement, beaucoup car ils ne le pouvaient pas. Si les chiffres sont encore compliqués à trouver pour les étudiants résidants dans le parc privé ou social hors CROUS, les étudiants restés dans leur chambre universitaire en résidence CROUS sont de l’ordre de 40% selon le ministère de l’enseignement supérieur.
Zoom sur les étudiants internationaux
Ces étudiants, déjà plus précaires de base (60% des bénéficiaires de nos AGORAé sont des étudiants internationaux par exemple) sont extrêmement touchés par cette situation. Nombre d’entre eux résident dans une chambre universitaire et subissent la fermeture des Restaurants Universitaires ou bien la perte d’une activité rémunérée. Ils sont souvent restés dans leur résidence étudiante par manque de moyens financiers pour rentrer auprès de leur famille.
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