La prévention est un enjeu d’avenir pour notre système de
santé, et les futurs professionnels en sont conscients. Aussi ont-ils accueilli
avec exigence mais aussi bienveillance ce dispositif dont chaque étape de la
conception a fait l’objet d’échanges et de concertations de qualité. Cela a
permis d’aboutir à la mise en forme d’un véritable projet pédagogique
d’initiation à la prévention, indispensable pour des études de santé encore
très centrées sur le curatif dans la plupart des filières. Mais alors que la
grande séquence nationale touche à sa fin avec encore quelques négociations et
arbitrages sur l’arrêté de cadrage, la transition dans les régions pose déjà
des difficultés. Ainsi, le dialogue social semble être moins une priorité pour
certains directeurs d’ARS que pour le gouvernement.
Rappelons-le, ce Service Sanitaire qui s’imposera à 6
filières à la rentrée 2018 (kinésithérapie, maïeutique, médecine, odontologie,
pharmacie et soins infirmiers) concerne en premier lieu la communauté étudiante
qui devra agir sur le terrain. Alors que la co-construction nationale a laissé
une large place à la FAGE, la transition vers l’échelon décentralisé des
comités de pilotage régionaux, a parfois conduit à perdre en route la
représentation étudiante. Ceci malgré l’obligation prévue dans les différents
textes réglementaires, encore en attente de publication, soit. Il reste dommage
qu’à l’heure du développement de la démocratie sanitaire, la population étudiante,
pourtant citoyenne et en âge de voter, ne soit pas encore reconnue comme un
interlocuteur en dehors de toute coercition. Un jour sera sans doute remise en
cause cette posture paternaliste de notre société qui, en limitant la mise en
responsabilité de sa jeunesse, retarde par ailleurs sa maturité et son
autonomie. Mais c’est un tout autre débat.
Par ailleurs, il est également pertinent de se souvenir
qu’un des objectifs très attendu du dispositif était la mise en œuvre d’un
projet construit en interfilière. La collaboration entre professionnels est un
enjeu majeur de notre système de santé, alors que le manque de communication et
de connaissance mutuelle entre ces professions conduit encore aujourd’hui à
prendre en charge en silo une personne qui constitue pourtant un être entier.
Utiliser le service sanitaire pour permettre aux étudiants d’apprendre à
travailler ensemble autour d’un projet commun est une opportunité à ne pas
manquer pour fluidifier plus tard les transitions entre professionnels, dans l’intérêt
premier des patients.
Pourtant, les premiers comités régionaux n’associent pas toujours
une représentation de l’ensemble des filières, pas même parmi les équipes
enseignantes. Cela interroge, alors que ce projet devra impliquer l’ensemble
des professions, comment imaginer que le dispositif sera monté efficacement si
l’ensemble des opérateurs ne sont pas associés à la co-construction et se
voient imposer tardivement un projet dont les grands axes ont déjà été arbitrés ?
Sans remettre en cause la nécessité de garder des groupes de
taille raisonnable pour piloter le dispositif, il reste néanmoins indispensable
qu’une représentation minimale des principaux acteurs du service sanitaire,
communautés étudiante et enseignante, puissent être associés au dispositif. Ne
pas le faire c’est prendre le risque de façonner un dispositif en ne tenant
compte que des contraintes d’une unique profession, limitant alors fortement la
capacité à l’intégrer de manière fluide dans les six filières concernées. Alors
que ces groupes commencent à se réunir dans chaque région et que les
fédérations de la FAGE dans les territoires doivent parfois jouer des coudes
pour être associées, les directeurs d’ARS – Agences Régionales de santé -
devraient pouvoir entendre ce message, sans quoi le dispositif pourrait bien
échouer à atteindre l’ensemble de ses objectifs.
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